Version originale, la version Tri Yann est plus courte
I
Ur werzenn nevez zo savet
Traitour, ah! mallozh dit 'ta! (bis)
War markiz Pontkalleg eo graet
Traitour, ah! Mallozh dit, mallozh dit
Traitour, ah! mallozh dit 'ta
War markiz yaouank Pontkalleg, Traitour...
Ker koant, ken drant, ker kalonek!
Traitour, ah! Mallozh dit...
Mignon a oa d'ar Vretoned
Abalamour anezho oa deuet
Abalamour anezho oa deuet
Hag etrezo oa bet maget
Mignon a oa d'ar Vretoned
D'ar vourc'hizien ne lâran ket
D'ar vourc'hizien ne lâran ket
A zo a-du ar C'hallaoued
A zo atav 'klask gwaskañ re
N'o deus na madoù na leve
Nemet poan o divrec'h, noz-deiz,
Evit magañ o mammou dehe
Lakaet en devoa en e benn
Disammañ deomp-ni hor c'hordenn
Gwarizi-tag d'ar vourc'hizien
O klask an tu e'it hen dibenn
- Aotrou Markiz, aet da guzhet,
An tu a zo gante kavet!
II
Pellik zo emañ dianket;
Evit e glask, n'e gaver ket
Ur paour eus kêr, o klask e voued,
Hennezh en deus hen diskuliet
Ur c'houer n'her defe ket graet
Pa vije roet de'hañ pemp kant skoed
Gouel Maria 'n Eost, deiz evit deiz,
An dragoned oa war vale:
"Lâret-hu din-me, dragoned,
O klask ar Markiz emaoc'h bet?
- O klask ar Markiz emaomp bet
Daoust penaos emañ-eñ gwisket?
- Er c'hiz diwar-maez 'mañ gwisket,
Glas e vorled hag eñ bordet
Glas e jak, ha gwenn e chupenn;
Bodroù ler ha bragoù lien
Un togig plouz neudennet-ruz
War e skoaz, ur pennad blev-du
Ur gouriz-ler, div bistolenn,
Hag hi a Vro-Spagn, a-zaou denn
Gantañ dilhad pilhoù-huan,
Gant unan alaouret dindan
"Mar fell deoc'h-hu reiñ din tri skoed
Me a roy deoc'h-hu e gavet
- Tri gwenneg zoken na roimp ket,
Taolioù sabren ne lâromp ket
Ne roimp ket zoken pemp gwenneg
Ha te reiñ deomp kaout Pontkalleg
- Dragoned ker, en an' Doue!
Na it ket d'ober droug din-me!
Na it ket d'ober droug din-me
Ho heñchañ raktal e rin-me
'Mañ-eñ du-se, er sal, ouzh taol,
O leinañ gant person Lignol"
III
"Aotrou Markiz, tec'het, tec'het!
Me wel erru an dragoned
Me wel an dragoned erru
Sternoù lugernus, dilhad ruz
- Me na gredan ket em c'halon
E krogfe ennon un dragon
Ne gredan ket 'vez deut ar c'hiz
Ma krog an dragon er Markiz"
Oa ket e gomz peurachuet
Tre 'barzh ar sal o deus lammet
Hag eñ da beg 'n e bistolenn:
"Neb a dost ouzhin 'n defo 'n tenn!"
Ar person kozh, dal m'her gwelas,
Dirak ar markiz 'n em strinkas:
"En anv Doue, ho Salvez,
Na dennet ket, ma Aotrou ker!"
Pa glevas anv hor Salver
En deus gouzañvet gant douster
Anv hor Salver pa glevas
Daoust d'e spered eñ a ouelas
Rez e galon strakas e zent
Ken a droc'has, sonn: "Deomp d'an hent!"
A-dreuz parrez Lignol pa ae
Ar gouer paour a lavare,
Lâret a rae al Lignoliz:
"Pec'hed eo eren ar markiz!"
Pa ae e-biou parrez Berne
Digoue't ur frapad bugale:
"Mad-deo'ch, mad-deoc'h, Aotrou Markiz!
Ni ya d'ar vourc'h, d'ar c'hatekiz
- Kenavo, bugaligoù vat,
N'ho kwelo mui ma daoulagad
- Da belec'h it eta, Aotrou;
Ha dont na reot souden en-dro?
- Me na ouzon ket, Doue 'r goar;
Bugale baour, me zo war var"
O cherisañ en defe graet
Panevet e zaouarn ereet
Kriz vije 'r galon na ranne
Re 'n dragoned zoken a rae
Paotred-a-vrezel, koulskoude,
O deus kalonoù kriz enne
Ha pa oa digoue't e Naoned
E oa barnet ha kondaonet
Kondaonet, naren d'an tud-par,
Nemet tud koue'et diouzh lost ar c'harr
Da Bontkalleg 'deus int lâret:
"Aotrou Markiz, petra 'peus graet?
- Pezh a oa dleet din da ober
Ha graet-hu ivez ho micher!"
IV
D'ar sul kentañ pask, hevlene,
Oa kaset kannad da Verne
"Yec'hed mat deoc'h-holl, er gêr-mañ,
Pelec'h 'mañ ar person dre-mañ?
- 'Mañ o lâret e oferenn,
'Mañ o vonet gant ar bregenn"
Pa oa o vonet d'ar gador,
Oa roet de'hañ ul li'her el levr
Ne oa ket gouest evit e lenn
Gant an daeloù dimeus e benn:
"Petra zo c'hoarvet a nevez
Pa ouel ar person er c'hiz-se?
- Gouelañ a ran, ma bugale,
War pezh a refac'h-c'hwi ivez
Marv, peorien, neb ho mage,
Neb ho kwiske, neb ho harpe,
Marv an hini ho kare,
Berneviz, koulz eveldon-me
Marv neb a gare e vro
Hag her reas betek ar marv
Marv da zaou vloaz warn-ugent
'Vel ar verzherien hag ar sent
Doue, ho pet outañ truez!
Marv eo 'n Aotrou! Marv eo ma mouezh!"
Le sujet
1
Un chant nouveau a été composé, il a été fait sur le marquis de Pontcalec;
- Toi qui l'as trahi, sois maudit sois maudit! Toi qui l'as trahi, sois maudit! -
Sur le jeune marquis de Pontcalec, si beau, si gai, si plein de coeur!
- Toi qui l'as trahi, sois maudit! sois maudit! etc.
Il aimait les Bretons, car il était né d'eux;
- Toi qui l'as trahi, sois maudit! soit maudit! etc.
Car il était né d'eux, et avait été élevé au milieu d'eux.
Il aimait les Bretons, mais non pas les bourgeois;
Mais non pas les bourgeois qui sont tous du parti français;
Qui sont toujours cherchant à nuire à ceux qui n'ont ni bien ni rentes,
A ceux qui n'ont que la peine de leurs deux bras, jour et nuit, pour nourrir leurs mères.
Il avait formé le projet de nous décharger de notre faix;
Grand sujet de dépit pour les bourgeois qui cherchaient l'occasion de le faire décapiter.
- Seigneur marquis, cachez-vous vite, cette occasion, ils l'ont trouvée! -
II
Voilà longtemps qu'il est perdu; on a beau le chercher, on ne le trouve pas.
Un gueux de la ville, qui mendiait son pain, est celui qui l'a dénoncé;
Un paysan ne l'eût pas trahi, quand on lui eût offert cinq cents écus.
C'était la fête de Notre-Dame des moissons, jour pour jour; les dragons étaient en campagne:
- Dites-moi, dragons, n'êtes-vous pas en quête du marquis?
- Nous sommes en quête du marquis; sais-tu comment il est vêtu?
- Il est vêtu à la mode de la campagne: surtout bleu orné de broderies;
Soubreveste bleue et pourpoint blanc; guêtres de cuir et braies de toile;
Petit chapeau de paille tissu de fils rouges; sur ses épaules, de longs cheveux noirs;
Ceinture de cuir avec deux pistolets espagnols à deux coups.
Ses habits sont de grosse étoffe, mais dessous il en a de dorés.
Si vous voulez me donner trois écus, je vous le ferai trouver.
- Nous ne te donnerons pas même trois sous; des coups de sabre, c'est différent;
Nous ne te donnerons pas même trois sous, et tu nous feras trouver Pontcalec.
- Chers dragons, au nom de Dieu, ne me faites point de mal:
Ne me faites point de mal, je vais vous mettre tout de suite sur ses traces:
Il est là-bas, dans la salle du presbytère, à table, avec le recteur de Lignol.
III
Seigneur marquis, fuyez! fuvez! voici les dragons qui arrivent!
Voici les dragons qui arrivent: armures brillantes, habits rouges.
- Je ne puis croire qu'un dragon ose porter la main sur moi;
Je ne puis croire que l'usage soit venu que les dragons portent la main sur les marquis! -
Il n'avait pas fini de parler qu'ils avaient envahi la salle.
Et lui de saisir ses pistolets:
- Si quelqu'un s'approche, je tire! -
Voyant cela, le vieux recteur se jeta aux genoux du marquis:
- Au nom de Dieu, votre Sauveur, ne tirez pas, mon cher seigneur!
A ce nom de notre Sauveur, qui a souffert patiemment;
A ce nom de notre Sauveur, ses larmes coulèrent malgré lui;
Contre sa poitrine ses dents claquèrent; mais, se redressant, il s'écria: " Partons! "
Comme il traversait la paroisse de Lignol, les pauvres paysans disaient,
Ils disaient, les habitants de Lignol: - C'est grand péché de garrotter le marquis! -
Comme il passait près de Berné, arriva une bande d'enfants:
- Bonjour, bonjour, monsieur le marquis: nous allons au bourg, au catéchisme.
- Adieu, mes bons petits enfants, je ne vous verrai plus jamais!
- Et où allez-vous donc, seigneur? est-ce que vous ne reviendrez pas bientôt? - Je n'en sais rien, Dieu seul le sait: pauvres petits, je suis en danger. -
Il eût voulu les caresser, mais ses mains étaient enchaînées.
Dur eût été le coeur qui ne se fût pas ému; les dragons eux-mêmes pleuraient;
Et cependant les gens de guerre ont des coeurs durs dans leurs poitrines.
Quand il arriva à Nantes, il fut jugé et condamné,
Condamné, non pas par ses pairs, mais par des gens tombés de derrière les carrosses.
Ils demandèrent à Pontcalec: - Seigneur marquis, qu'avez-vous fait?
- J'ai fait mon devoir; faites votre métier! -
IV
Le premier dimanche de Pâques, de cette année, un message est arrivé à Berné. - Bonne santé à vous tous, en ce bourg; où est le recteur par ici?
- Il est à dire la grand'messe, voilà qu'il va commencer le prône -
Comme il montait en chaire, on lui remit une lettre dans son livre:
Il ne pouvait la lire, tant ses yeux se remplissaient de larmes.
- Qu'est-il arrivé de nouveau, que le recteur pleure ainsi?
- Je pleure, mes enfants, pour une chose qui vous fera pleurer vous-mêmes:
Il est mort, chers pauvres, celui qui vous nourrissait, qui vous vêtissait, qui vous soutenait;
Il est mort celui qui vous aimait, habitants de Berné, comme je vous aime;
Il est mort celui qui aimait son pavs, et qui l'a aimé jusqu'à mourir pour lui;
Il est mort à vingt-deux ans, comme meurent les martyrs et les saints.
Mon Dieu, avez pitié de son âme! le seineur est mort! ma voix meurt!
- Toi qui l'as trahi, sois maudit! sois maudit! Toi qui l'as trahi, sois maudit!